Tante Irène
"Car
mes cendres seront plus chaudes que leur vie" (Anna de Noailles)
C’est indiqué à l’entrée : salle Debussy. Elle
avance, concentrée sur le mouvement de son diaphragme : un parapluie qu’elle
déplie et replie avec application.
Son oncle, assis dans le patio lit l’Equipe.
Il se lève en l’apercevant, l’étreint gauchement, étouffe un borborygme. Ils
échangent quelques mots, elle dit les paroles qui lui paraissent appropriées.
Silence. Elle se surprend à rêver d’un café, avale sa salive. La chambre funéraire
est encombrée de bouquets de roses et de compositions florales étranges et
compliquées. Dans la pénombre, le cercueil est posé sur un socle. Sur le satin
blanc, le visage fardé, légèrement dissimulé par un drap, ne révèle rien.
C’était
il y a deux jours : on l’a retrouvée, sur la voie ferrée. Après-demain
les obsèques. Oui Je serai là.
Elle
sort, aspire une goulée d’air caniculaire. Au coin de la rue, le Carmen’s bar.
"Un grand crème s’il vous plait.... Et ...un croissant".